Le sport c’est la panacée, mais on n’en fait pas assez !

Une récente étude de l’Anses (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire) constate qu’une proportion effarante de 95% de la population française manque d’activité physique. Promouvoir l’activité physique et sportive n’est plus une option. C’est une nécessité, un enjeu de santé publique. Si la France, à de nombreux égards, fait plutôt figure de bonne élève dans ce domaine, la pandémie de Covid-19 et ses multiples implications dans le quotidien des Français semblent être venues perturber un équilibre peut-être plus fragile qu’on ne croyait…

 

Le sport, c’est la santé… mais pas seulement

D’après le rapport Les chiffres clés du sport 2020 publié par l’Institut National de la Jeunesse et de l’Éducation Populaire (Injep), sport et santé sont étroitement corrélés. La santé ressort comme première motivation à la pratique d’une activité sportive pour 27% des Français pratiquants, loin devant la détente, le plaisir ou l’amélioration de l’apparence. Cette motivation clairement affichée ne concerne pas que la santé physique. Les bienfaits de l’activité sportive sur le mental sont également nombreux, et les Français le savent : augmentation des facultés cognitives, réduction de l’anxiété et du stress, diminution du risque de dépression ou de suicide, amélioration de la qualité du sommeil. Autant de vertus généralisées à l’ensemble de la population, tous sexes et âges confondus.

Défendre la systématisation de l’activité physique et sportive devient donc essentielle à l’heure de la sédentarisation des modes de vie, du vieillissement de la population et de l’allongement de l’espérance de vie. En France, plus d’une personne sur quatre a aujourd’hui plus de 60 ans, contre seulement 17% il y a quarante ans. Cette transformation de la pyramide des âges a nécessairement entraîné une hausse des dépenses de protection sociale qui, sur le même laps de temps, ont augmenté de 6 points pour représenter aujourd’hui 31% du PIB (source France Stratégie). Une croissance presque exclusivement alimentée par les dépenses vieillesse-survie et maladie… Ainsi, l’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire de l’Alimentation, de l’Environnement et du Travail (ANSES) évalue à 30% le taux de diminution de la mortalité précoce grâce à une activité physique régulière.

 

 

Au-delà des bénéfices évidents de l’activité physique et sportive sur la santé, citons aussi son rôle dans l’insertion sociale, scolaire et professionnelle des populations issues de quartiers prioritaires. L’association Sport dans la ville, la principale en France, accompagne ainsi près de 7 000 jeunes par an dans les 50 centres présents sur le territoire, avec une mission claire : emmener ces jeunes sur le chemin de la réussite par la pédagogie et les valeurs d’inclusion, de tolérance et de vivre-ensemble qu’incarne et défend le sport.

 

Enfin, la médiatisation de grands événements sportifs a de nombreux impacts, surtout en cas de victoire nationale. Un impact économique, d’abord, avec la croissance significative de certains postes de consommation des ménages mesurés par l’Insee, tels que les téléviseurs (+10,1% en 2018) ou la consommation en débit de boissons (+9,1% en 2018). Un impact sur le moral des Français, ensuite. Cet indicateur avait progressé de près de 3 points en juillet 1998, 2,1 points en juillet 2006 et 2,3 points en juillet 2018. En 2002 et 2010 en revanche, suite à l’élimination de l’équipe de France, le moral a chuté respectivement de 1,8 puis 1,2 points. Un impact salutaire, enfin, avec une baisse non négligeable du nombre de suicides en cas de victoire sportive nationale, événement fédérateur et générateur de lien social, ce même lien dont la perte est l’une des premières causes de suicide. La National Library of Medicine a ainsi constaté une baisse de 10% du nombre de suicides en France lors de la Coupe du Monde 1998. Le même phénomène a été observé dans d’autres pays, et pour d’autres disciplines.

 

La France : une nation en mouvement

Au sein de l’Union Européenne, la France caracole en tête des pays les plus dépensiers en matière de sport, toutes sources confondues, publiques comme privées. Ce sont en effet près de 40 milliards d’euros qui sont injectés chaque année dans l’ensemble des disciplines (source vie-publique.fr). Même si la contribution publique se monte à près de 15 milliards d’euros, pour 1,1% de la dépense publique totale, c’est la contribution privée qui tend à gagner en importance, via les entreprises mais surtout les ménages, à hauteur de 20 milliards d’euros selon l’Injep. Le financement de manifestations sportives exceptionnelles représente aussi un poste important d’investissement public. En 2021, c’est une hausse de 13% de la participation de l’État aux dépenses de sport qui a été enregistrée pour financer la préparation des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris en 2024 (source sports.gouv.fr).

 

Avec plus de 180 000 associations sportives reconnues en France, les Français ont l’embarras du choix ! D’après le dernier rapport de l’Injep, 66% des Français de plus de 15 ans ont pratiqué au moins une activité sportive en 2018. La France s’inscrit ainsi dans la moyenne de ses voisins européens, avec un contraste net entre pays du Nord, pouvant dépasser les 80%, et pays du Sud, affichant pour certains des taux inférieurs à 40% (source Eurobaromètre 2017). Côté sédentarité, un Européen passe en moyenne 7h26 assis par jour, contre 7h24 pour un Français, 5h50 pour un Finlandais, et 8h13 pour un Britannique (source Harris Interactive).

 

Sans être accros au sport, les Français y accordent donc une place honorable dans leur quotidien. Preuve en sont les 16,4 millions de licences délivrées en 2018, en croissance plus rapide que celle de la population (source Injep). C’est le football qui domine largement le classement, dépassant en 2018 les deux millions de licences délivrées, suivi du tennis (990 000) et de l’équitation (630 000). Loin d’une hypothétique cohérence nationale, de nombreuses spécificités régionales existent ! Ainsi, la proportion de licenciés de tennis est plus forte dans l’Ouest parisien, sur la Côte Basque et sur la Côte d’Azur, tandis que l’athlétisme est très représenté à l’Ouest et le rugby, sans surprise, dans le quart Sud-Ouest (source C-Ways)… Une pratique sportive qu’on devine donc très ancrée dans les us et coutumes locaux.

Part de la population française licenciée auprès des principales fédérations sportives (données 2018)

 

Le nombre et la diversité des sports représentés suit aussi une courbe dynamique, à l’image de disciplines comme la boxe ou le triathlon, qui enregistrent une hausse du nombre de leurs licenciés de l’ordre de 60% depuis dix ans. Dans un autre domaine, le padel, sport de raquette venu du Mexique, voyait doubler son volume de recherches Google en 2021 (source Nextrends – C-Ways).

 

Un bilan inquiétant des confinements à répétition

38% des Français déclarent avoir diminué leur activité physique lors du premier confinement en mars 2020 (source Injep). C’est deux fois plus que ceux qui affirment l’avoir augmentée ! La première raison de cette diminution est évidemment à aller chercher du côté des restrictions sanitaires alors mises en place, empêchant la pratique de certaines disciplines, difficilement substituables par une activité à domicile. Ainsi, certaines activités pourtant ouvertes à la pratique n’ont pas profité de ces restrictions imposées à d’autres. Sans surprise, le taux de pratique du sport à domicile a enregistré une progression fulgurante, passant à 47% contre à peine 18% en 2018. En témoigne l’évolution du volume de certaines recherches Google lors du premier confinement, comme le fitness (x5 vs janvier 2020, source C-Ways), le gainage (x3) ou les vélos elliptiques (x2,5).

 

L’injep souligne en parallèle que des facteurs psychologiques, tels que l’envie, la motivation ou l’état d’esprit adéquat pour la pratique d’un sport, ont cruellement fait défaut lors des confinements, remettant en question cette pratique même.

Via son baromètre CoviPrev, Santé publique France révèle l’étendue des dégâts : la proportion de Français montrant des signes d’un état dépressif a atteint des niveaux alarmants lors des trois confinements 2020, montant jusqu’à plus de 22%. Aujourd’hui stabilisé autour de 17%, le niveau reste cependant supérieur de 7 points à celui observé hors épidémie. Les problèmes de sommeil, eux, affectent aujourd’hui deux Français sur trois, niveau supérieur de 17 points à celui observé hors épidémie. Plus grave encore, la proportion de Français déclarant entretenir des pensées suicidaires est grimpée à 10%, contre 5% habituellement.

Autre fait marquant, c’est la première fois depuis que l’Injep le mesure que le nombre de licences sportives a chuté en France. C’est près d’1,5 million de titres délivrés en moins en 2020 pour une baisse de 8%, qui concerne l’ensemble des disciplines sans exception. Et les perspectives ne sont pas bonnes, si l’on en croit l’appétence des non pratiquants pour la pratique ou la reprise d’une activité : ils ne sont que 12% à l’envisager en 2021, contre 20% en 2018. Parmi les Français ayant dû diminuer leur pratique pendant les confinements, un sur quatre seulement souhaite pratiquer une nouvelle activité dans l’année, contre un sur cinq en moyenne historique (source Injep).

 

 

La vraie ambition des JO 2024

L’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques en 2024 à Paris représente-t-elle une opportunité de faire bouger les choses, et les Français avec ? Oui, selon des chercheurs de Sport England, qui ont analysé l’impact des Jeux de 2008, où les Britanniques avaient obtenu 19 titres olympiques, et ceux de 2012, organisés à domicile. Résultat : respectivement +1,1 million et +0,7 million de pratiquants hebdomadaires recensés sur le territoire britannique lors des deux manifestations…

 

Avec son ambition assumée et affichée de générer une « prise de conscience collective » des bienfaits du sport sur une palette d’aspects sanitaires, sociaux, économiques et culturels, Paris 2024 s’engage à faire augmenter la pratique du sport chaque jour, à chaque endroit et pour chaque tranche d’âge (source paris2024.org). Vaste programme, donc, à l’heure où l’état d’énergie disponible des Français semble bien bas.